mardi 18 janvier 2011

L'attentat - Yasmina Khadra


Eh bien quel livre ! Je ne sais pas par où commencer, par l'histoire, par l'effet que ça a fait sur moi, par les messages forts de ce livre, par mes priorités que ce livre m'a rappelées ou bien par sa philosophie tiraillée parfaitement jumelle à la mienne.

C'est l'histoire d'un couple arabe vivant à Israel, il est médecin, elle est ingénieure, ils vivent dans un quartier huppé à Tel Aviv, le médecin a même obtenu la nationalité israélienne, bien intégrés avec plein d'amis juifs... etc. Ils ne sont pas pratiquants et le médecin est même limite agnostique, il croit en Dieu mais pas en ses saints. Si Nietzsche dit que Dieu est mort, l'auteur nous demande à la fin du livre de libérer Dieu de tout ce qu'on lui a collé au dos depuis le temps... 

Tout allait normalement jusqu'au jour où la femme s'explose dans un restaurant de juifs, un attentat suicide, elle a choisi de mourir en martyr, en kamikaze. Le mari essaiera tout au long du livre de comprendre pourquoi.

J'ai été agréablement surprise par cet auteur qui ne m'inspirait pas du tout avant, je l'ai lu dans le cadre du baby challenge drame, et quel drame ! ça ne rigole pas. Ses livres ne m'intéressaient pas avant justement parce que je savais que c'était dramatique, mais bon, on va tourner le dos à la vérité pour combien de temps encore ?

Yasmina Khadra expose ici deux points de vue opposés sur le djihad, le point de vue de ceux qui voient ça comme un devoir minimum pour sauver leur honneur et l'intégrité de leur patrie et de toute une nation, ceux qui le voient comme l'essence même de la vie, nous sommes là pour servir Dieu après tout et non pas être esclaves de cette vie illusoire et qui ne passera que trop vite. Et puis il y a le point de vue des intellectuels qui défendent la vie et trouvent que c'est ce qui compte plus que tout et que c'est le premier droit de l'homme, la vie. Ceux qui sont contre les sacrifices des plus braves pour la survie des plus lâches. 

C'est un sujet très mitigé et trop délicat et sensible à aborder. J'avais les larmes aux yeux tout au long de ce livre, dans différents passages et pour différentes raisons. Je suis d'accord avec les deux points de vue. Il est vrai que nous sommes en guerre, c'est une vérité non discutable, et quand je dis nous je parle des musulmans. Nous sommes en guerre, où que nous soyons, la bataille se déroule en Palestine mais nous sommes tous concernés et nous devrions nous sentir tous en guerre où que nous soyons. Nous sommes en guerre, sauf que nous ne sommes pas sur place, nous sommes loin de nos terres mais nous sommes en guerre à tout point de vue. Nous ne sommes peut-être pas sur place pour nous battre mais l'ennemi lui est partout et nous combat où que nous soyons, en faisant tout son possible pour détourner notre attention autant que possible de cette vérité, et tous les moyens sont bons. Et même si nous ne sommes pas sur place nous pouvons tout aussi bien nous battre de manière différente, tous les moyens sont bons aussi. Et la première chose à faire c'est ne jamais oublier.

Je suis pour la vie, je défends la vie et le droit à la vie, mais tout comme son épouse je me dis toujours qu'il faut la mériter. Et son sentiment de culpabilité de vivre une "belle" vie alors que son peuple est entrain de périr et de se faire massacrer sans pitié par les machines meurtrières les plus avancées alors qu'il n'a que ses enfants et ses pierres pour se défendre, elle ne pouvait plus supporter son rythme de vie et le trouvait complètement dérisoire. Je me suis beaucoup retrouvée dans son sentiment de culpabilité, un sentiment que je ressens à chaque fois que j'achète un Kinder ou que je débourse une somme d'argent dans un restaurant de haut standing, ou que je danse sur une musique de Ke$ha... Il y a toujours ce goût amer qui bloque au fond de ma gorge et ce noeud au creux de mon estomac, qui me rappelle à l'ordre et je sais que je n'oublie pas mais la plus part du temps on fait semblant. 

Ce livre m'a rappelée à l'ordre, c'est un livre pacifiste et juste. Il présente les faits et les points de vue et laisse libre cours au lecteur de choisir son camp, parce qu'il faut bien en choisir un, enfin surtout quand on est musulman. Nous sommes une seule nation et parce que nous sommes musulmans avant d'être quoi que ce soit d'autre, nous ne devons jamais oublier que c'est une responsabilité avant toute autre chose.

Un livre poignant qui marquera tout le monde, sans exception. A lire.

Quand je pense que notre ennemi est lâche au point d'attaquer des enfants, des bébés et des femmes et fuit les hommes.

Quand je pense qu'il détourne notre attention principalement par des divertissements... SHAME ON US. On ne pouvait pas tomber plus bas.

9 commentaires:

lasardine a dit…

un livre marquant!

littlefrog a dit…

Encore un livre que je n'ai pas lu ! En tout cas, cela doit te rassuré de l'avoir aimé pour ton challenge drame après le désastreux "la route" !

Hajar a dit…

Exacte! Maintenant j'ai enchainé avec un autre dans le cadre du même challenge, et qui a l'air tout aussi génial "Les yeux jaunes des crocodiles" de Katherine Pancol.

Christophe P. a dit…

J'ai énormément aimé ce livre, immensément, infiniment... je n'ai pas de mots pour dire à quel point il m'a touché. Et pourquoi m'a-t-il touché ? parce que justement il dépasse de loin les clivages religieux... Je suis catholique par mon baptême et agnostique par mon cerveau, mais je ressens énormément de peine pour ces hommes et ces femmes qui souffrent de n'être pas libre en Palestine... en Afrique, en Asie...
Ce que j'ai retenu de ce livre ne concerne pas le djihad (qui est avant tout une quête spirituelle, mais je me trompe sans doute et peut-être sauras-tu m'éclairer sur ce point) mais ce délire propre à certains hommes qui un jour décident d'être des élus... Et c'est ce qui arrive à ce médecin vivant parmi la souffrance des siens sans même la remarquer... Et cette violence qui lui saute au visage le laisse perplexe et c'est ce qu'il veut comprendre. Pour ce qui est du terrorisme, voici mon avis (d'Occidental paisible vivant sur un continent paisible)... Je me souviens de cette époque où la télé nous crachait chaque semaines ces images désolantes d'attentat en Irlande, Allemagne, Italie, Espagne et ma foi, même dans mon petit pays tranquille, Belgique. Ce que je sais c'est que les communistes ont perdu malgré leurs militants blindés d'explosifs et que l'Irlande a réglé une grosse partie de ses soucis lorsque l'IRA a déposé les armes... Quelle leçon à tirer de tout cela ? Bien des maris ont perdu leurs épouses, des mères leur fils en ces périodes troubles d'Europe... et ces poseurs de bombes aujourd'hui ne sont plus en Europe pour pleurer tous ces gens, mais en Afrique ou ailleurs pour entraîner et former d'autres hommes à tuer au nom de Dieu sait quoi. Ce que je sais aussi c'est qu'il ne faut pas confondre territoire et religion, l'un sert à tuer et l'autre à aimer. Par contre, je déplore grandement le silence qui est fait autour de ces pauvres gens en Palestine... la communauté internationale y est pour beaucoup, peut-être est-ce là que se trouve notre devoir d'êtres humains.
En tout cas, un grand merci pour ton billet... J'espère que grâce à cette intervention, le silence est dehors :D

Hajar a dit…

Merci pour ton commentaire Christophe :) Je ne saurai trop t'éclairer sur le djihad, je dois dire que je suis très peu informée sur ma religion, mais toutes ces gens qui s'explosent comme ça, pour moi ça me semble plus un geste de désespoir et de colère qu'autre chose, quand on a tout perdu et quand on voit que la situation est injuste et que ça n'avance pas, quand on culpabilise alors on y va ! On s'explose, au moins on aura fait quelque chose pour notre cause. Mais ce que je sais c'est que le djihad n'est pas que physique, Dieu nous demande dans le Coran de faire le djihad avec nos âmes d'abord et notre argent pour ne jamais nous oublier dans ce monde matériel, Il ne nous a jamais demandé d'aller nous exploser sur les autres, encore moins sur des enfants comme elle a fait, elle. Les enfants sont les protégés de Dieu, quels qu'ils soient.
Il m'a épaté ce Khadra, j'en lirai sûrement d'autres. Et merci encore pour ton commentaire :)

Leila a dit…

ça m'a pris 4 café, deux jus d'orange, bref 3heurs dans un café pour le finir d'un trait..
je me suis prise une bonne claque, le genre de livre qui reveille sans employer des grands mots , de grand speech..
j'avais envie de me balader dans les rues de Jerusalem, de prendre les petits dans les bras...
je me suis donc renseigné, et pour y aller, il me faut un visa israelien, l'état palestinien n'existant pas .. :( je vais donc m'abstenir
merci de m'avoir fait découvrir YAsmina.
je t'embrasse

Hajar a dit…

Je t'en prie :) Je ne m'attendais pas à ce qu'il me fasse autant d'effet aussi mais je pense que l'auteur a bien atteint son objectif.

Oasis de lettres a dit…

Ce livre m'a vraiment marquée. La talentueuse plume de Yasmina Khadra m'a sensibilisée et m'a donné à réfléchir sur un sujet très délicat.

J'espère lire d'autres romans de cet auteur par la suite.

Frankie a dit…

J'ai beaucoup aimé ce livre qui confronte, comme tu dis, deux points de vue, voire deux idéologie. Je ne suis pas pour le terrorisme mais je peux comprendre la démarche de l'épouse de Amine. Une superbe histoire.

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